Les ordonnances de Villers-Cotterêts, Blois et Saint-Germain
Les registres paroissiaux
Les généalogistes amateurs qui n’ont jamais dépassé le XIXe siècle
s’imaginent parfois que tout s’arrête à la Révolution ou que les registres
paroissiaux de l’Ancien Régime sont conservés par les églises. En fait, les
registres paroissiaux sont l’équivalent de l’état civil et ont été créés en
France par l’ordonnance de Villers-Cotterêts du 15 août 1539. Depuis 1792,
ils sont conservés par les mairies. Les archives départementales en gardent
les doubles.
L’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) Cette
ordonnance demande l’enregistrement obligatoire par les curés de tous les
baptêmes, ce qui revient à noter les naissances, puisque les baptêmes se
faisaient dans les trois jours. La raison ? Que chacun puisse prouver son
âge, tant pour disposer de la majorité légale vis-à-vis de ses parents que
pour postuler aux charges exigeant un âge minimum. L’ordonnance impose aussi
l’enregistrement des sépultures, afin d’éviter les litiges liés aux
successions et aux preuves de décès. François 1er exige que ces registres,
qualifiés de documents publics, soient conservés : « Les curés seront tenus
mettre les dicts registres par chacun an devers le greffe ». La mise en
place se fait assez lentement, mais se voit renforcée par le Concile de
Trente (1545-1563) qui prescrit pour l’Europe entière l’enregistrement des
baptêmes par les curés, avec mention obligatoire des parrains et des
marraines. Cette ordonnance de Villers-Cotterêts contribue à figer les
noms de famille, le nom du père étant à chaque fois mentionné dans les actes
de baptême ou de mariage. Plus exactement, elle contribue à le figer
phonétiquement car l’orthographe elle-même reste fluctuante jusqu’à
l’apparition en 1877 du livret de famille, qu’il faut produire à chaque acte
de la vie civile. Jusqu’à cette date, un dicton populaire assure que « les
noms n’ont pas d’orthographe ».
Des registres parfois plus anciens Avant
l’ordonnance de Villers-Cotterêts, de nombreux curés avaient commencé à
noter les actes de baptême, mariage et sépulture. Ils le faisaient soit pour
des motifs comptables (enregistrer les sommes reçues par les familles pour
chaque acte) soit pour des motifs religieux (puisqu’un veuf ne pouvait
épouser la marraine d’un de ses enfants, ni une veuve un parrain, les actes
faisaient preuve). Mais, faute d’obligation légale, ces registres
disparaissaient souvent à la mort du curé et ne sont pas toujours parvenus
jusqu’à nous. Le plus ancien conservé en France date de 1334, établi à Givry
en Saône-et-Loire.
Les ordonnances de Blois (1579) et de Saint-Germain (1667)
Par l’ordonnance de Blois de 1579, Henri III réaffirme
l’obligation paroissiale d’enregistrement des baptêmes et des sépultures. Il
impose aussi celle des mariages, pour empêcher les unions multiples et les
mariages clandestins. En 1667, l’ordonnance de Saint-Germain demande
l’enregistrement des actes en double exemplaire, le registre initial
demeurant dans la paroisse, le second partant au greffe du baillage ou de la
sénéchaussée. En 1736, une déclaration royale rappelle le contenu
rédactionnel de chaque type d’acte et l’obligation du versement des doubles
des registres paroissiaux au greffe.
Les catholiques oui,
mais les autres ? Comme les registres sont tenus par les curés,
les familles juives ou protestantes n’y figurent bien sûr pas et les
généalogistes qui en ont dans leur arbre doivent passer par les documents
notariés pour remonter le temps. Signalons que quelques pasteurs
protestants ont tenu en cachette des registres équivalents, souvent perdus
lors des périodes de répression. Mais le baptême étant le même dans les deux
religions, les protestants n’hésitaient pas à faire baptiser leurs enfants
par le curé ; ce sont les actes de mariage et de sépulture qui deviennent
introuvables. Il semble peut-être ridicule de signaler que tout le reste
de la population se retrouve dans les registres paroissiaux, mais je préfère
le rappeler : j’ai rencontré le cas véridique d’un généalogiste affirmant
qu’il ne pourrait pas remonter le temps avant la Révolution « parce que
toute sa famille était athée » ! Comme si on refusait aujourd’hui
d’enregistrer ses enfants à l’état civil sous prétexte qu’on n’aime pas les
fonctionnaires…
Les lieux de recherche Un cliché
tenace assure que la Révolution aurait détruit tous les papiers anciens, ce
qui est faux. Des documents féodaux ont été brûlés, mais rarement les
registres paroissiaux, transférés dans les mairies en 1792. Les guerres
mondiales ont fait infiniment plus de dégâts. Les recherches dans les
registres paroissiaux antérieurs à 1792 se font donc tout à fait normalement
soit dans les mairies soit aux archives départementales. Les archives
départementales évitent des déplacements, puisqu’on a en un seul lieu les
registres de toutes les communes. Mais aller de mairie en mairie a un autre
charme : cela permet de voir à quoi ressemblait le village où vivaient les
ancêtres. Attention cependant : certaines petites localités se sont
débarrassées du souci de conservation des registres anciens en les confiant
aux archives départementales, qui détiennent désormais les deux jeux.
Téléphonez au préalable pour éviter un trajet inutile. Pour gagner du
temps, vous pouvez aussi consulter les dépouillements réalisés depuis des
années par les associations de généalogie locale, et déposés sur le site
www.genealogie.com.
Article de Marie-Odile Mergnac, le
29 juin 2012 sur le site genealogie.com
( JLB )
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